Le thème retenu pour cette 8ème édition de la Fête01, « Le grand détournement vs sérendipité », met à nouveau en opposition deux termes qui peuvent sembler de prime abord éloignés. Ce « Grand détournement » peut tout d’abord être considéré sous plusieurs angles :
- Le grand détournement de la finalité de l’économie, souligné amèrement par la dernière crise financière, finalité supposée conduire au bien être social,
- Le grand détournement sémantique d’élus et de personnalités publiques qui font parfois perdre aux mots leur épaisseur, leur sens à force d’usages galvaudés,
- Le grand détournement technologique opéré par des communautés de hackers qui s’approprient des techniques et transforment objets et dispositifs informatiques pour les sortir de leur déterminisme natal,
- Le grand détournement artistique à l’heure où le film le plus primé à Hollywood est réalisé par un français auparavant célèbre pour ses montages audacieux au regard du droit d’auteur, notamment pour son film éponyme.
Cet art du détournement est aujourd’hui considéré comme un facteur de créativité (on parle de « bidouillabilité » de certains objets numériques) dans les milieux artistiques et technologiques et vient parfois à ce titre se ressourcer dans une mer de sérendipité.
Du conte « The three princes of Serendip » (les trois princes de Ceylan) vient en effet l’expression anglo-saxonne « serendipity », traduite en français par le mot « sérendipité » encore absent du dictionnaire. La sérendipité désigne l’action qui consiste à trouver quelque chose qui n’était pas initialement prévu dans la démarche, une sorte de hasard heureux d’où naissent des associations d’idées originales. La Sérendipité est donc le don de faire des trouvailles, de trouver ce qu’on ne cherche pas, dans la science, la technique, l’art, la politique, le droit. Ce sont des découvertes, des inventions et des créations « accidentelles ». Un cas de sérendipité, par définition, est une observation surprenante suivie d’une explication juste.
Ce terme, initialement inventé par Horace Walpole lors d’une correspondance en 1754 et popularisé par le Zadig de Voltaire, est repris par des chercheurs comme Thomas Huxley lors de conférences à propos des découvertes de Darwin, en le définissant comme un procédé commun à l’histoire, à l’archéologie, à la géologie, à l’astronomie et à la paléontologie. Ce concept connait un succès grandissant qui dépasse le milieu de la recherche pour transparaitre aujourd’hui dans les méthodes de management destinées à susciter des processus de créativité à l’œuvre dans la formation du savoir et de l’intelligence collective, « carburants » des industries créatives. On peut également caresser une vision plus romantique de la sérendipité, partant du principe qu’elle constitue un élément symbiotique de la création artistique. La Fête01 2012 sera l’occasion de se faire télescoper ces deux termes à travers des projections, des performances, des installations, des discussions et conférences.